Madeleine

Mon grand garçon, si je t'écris
C'est pour te parler du pays
Ça fait longtemps que t'es parti
Mais sois certain, on ne t'oublie

Les trois pommiers que t'as plantés
L'hiver avant de nous quitter
Ils ont fleuri en juin dernier
Ils rapporteront cette année

Et Madeleine
Chaque semaine
Vient aux nouvelles
Des Amériques

On lit parfois dans le journal
Que par là-bas, ça va très mal
Faut pas t'mêler de leurs affaires
Faut les laisser se faire la guerre

Ton oncle Étienne est décédé
D'un mauvais mal, l'hiver dernier
Les blés sont mûrs, a dit ton père
J'entends battre la faux dans l'air

Et Madeleine
Chaque semaine
Vient aux nouvelles
Des Amériques

Ceux d'la Grand-Terre ont tout vendu
Depuis qu'ils ont perdu la fille
Le père Mathieu ne pouvait plus
Tenir tout seul la métairie

Les deux garçons étaient partis
Depuis six mois vivre à Paris
Des gens d'ailleurs ont pris la terre
Pour planter du bois de misère

Et Madeleine
Chaque semaine
Vient aux nouvelles
Des Amériques

Tu connaissais le fils Renaud
Il a fini son régiment
Ta soeur l'a vu baigner les ch'vaux
Hier matin près des étangs

Elle nous a dit, en rougissant
Qu'il passerait à la maison
Et je crois bien qu'avant longtemps
Ces deux-là nous les marierons

Et Madeleine
Chaque semaine
Vient aux nouvelles
Des Amériques