Arizona
François Budet
4:13Quand les anciens voulurent partir vers le couchant Ils décrochèrent un jour un bout du continent Profitant d'une nuit sans visibilité Finirent par tout larguer et cap sur l'Occident Après une dérive qui dura deux mille ans Se mirent à l'ancrage aux confins de l'Iroise C'est la fille de Morgane qui me l'a raconté C'est ainsi que naquit son île d'Ouessant C'est mon île C'est mon île Quand le vent de Gwalarn et les oiseaux de mer Remorquent les nuages du Pays des abers Il neige de l'écume certains matins d'hiver Y a comme des flocons sur le toit des maisons Et quand le mauvais temps, comme un bélier sauvage Vient se briser les cornes aux dentelles de roches Ses guenilles accrochées aux pointes des balises La sirène de brume pousse le cri de l'île C'est mon île C'est mon île C'est mon île de Pâques et c'est ma Santorin Mon atoll au soleil, c'est mon île au trésor Je l'ai vue toute nue dans un voile de crachin Avec au bord des yeux, pour larmes des embruns Quand la baie de Lampaul offre ses jambes folles À la caresse douce du flot qui la remonte Quand le soleil de mai la rend bien moins sauvage Moi je deviens l'amant de l'île d'Ouessant C'est mon île C'est mon île Quand les épées des phares aux lames argentées Découpent dans le soir des pans d'éternité Il y a dans le silence comme une résonance On apprend à se taire sur le vaisseau de pierre Je veux laisser poser ma tête sur son ventre Et me laisser bercer le reste de mon temps C'est là que j'attendrai qu'on vienne m'embarquer Pour mon dernier voyage vers l'île d'Avalon C'est mon île C'est mon île C'est mon île C'est mon île